Réflexions

AFELSH … ou quand les Lettres s’inscrivent dans le mouvement institutionnel

Autant il est notoire que les sciences dites dures multiplient les échanges et les accords internationaux – l’édition de janvier en  témoigne –, autant il est généralement méconnu  que les facultés de sciences humaines s’inscrivent elles aussi dans la démarche d’une internationalisation institutionnelle. Pourtant, un  organisme tel que l’Association des Facultés ou Etablissements de Lettres et Sciences Humaines des universités d’expression française (AFELSH) a été fondé il y a vingt ans déjà, et l’AFELSH regroupe à l’heure actuelle des membres issus des quatre continents potentiellement concernés : Afrique, Asie, Europe et Amérique. Lors du colloque annuel, qui s’est tenu à Ottawa en octobre dernier, des représentants de ces quatre continents (et d’une vingtaine de pays) avaient effectivement fait le déplacement, montrant par là même toute l’importance que le réseau représente pour des universités aussi lointaines que celles de Madagascar ou du Vietnam par exemple.

Cet attachement croissant s’explique sans doute d’une part par le statut même de l’AFELSH ; en effet, elle est un des réseaux institutionnels reconnus de la francophonie ; ainsi, l’AFELSH est un des membres titulaires des instances de l’Agence universitaire de la Francophonie (AUF), et celle-ci est un de ses principaux bailleurs de fonds. Mais ce sont surtout les objectifs généraux  redéfinis en 2003 et les actions concrètes entreprises ces dernières années sous la présidence du Professeur Manfred  Peters (FUNDP) qui lui ont insufflé un dynamisme nouveau. Ces dernières années, l’AFELSH a permis de (re)tisser des liens étroits entre des institutions et des Hommes, liens dont j’ai pu mesurer à plusieurs reprises l’importance vitale  pour certains partenaires.

Pour être concret, je citerai trois domaines d’action particuliers de l’association. Un de ses objectifs majeurs est d’apporter une contribution à l’harmonisation des cursus et de mettre en commun une réflexion sur les contenus des programmes. A l’heure où le processus de Bologne modifie en profondeur toutes les structures des études en Europe, l’AFELSH est devenue pour de nombreux partenaires, surtout mais non exclusivement africains, un interlocuteur privilégié. En effet, comme l’a montré le Colloque organisé sur ce thème au Sénégal en 2004, les changements intervenus en Europe requièrent des adaptations nombreuses et complexes dans les structures d’études de pays tiers, ceci afin de ne pas mettre en péril leurs propres systèmes d’homologation des diplômes ni de mettre des freins supplémentaires à la mobilité nord-sud. Même si les réponses en ce domaine n’ont pu être toutes satisfaisantes à ce jour, le travail d’information et d’expertise accompli – notamment par les représentants des universités de la Communauté française Wallonie – Bruxelles – est remarquable.

L’échange d’informations concernant les transformations pédagogiques et les nouvelles orientations de la recherche est un autre objectif assigné à l’AFELSH ; l’émergence, ces dernières années, d’universités et de campus virtuels a tout particulièrement retenu son attention, et le colloque de Sousse (Tunisie, 2005)  sur la formation à distance a permis de procéder d’une part à une première mise en commun des données disponibles et, d’autre part, à lancer une vaste réflexion  sur les possibilités réelles de chacune des universités membres de s’inscrire à coûts supportables sur la carte géographique de ce monde nouveau.  La réflexion sur ce sujet se poursuit sans relâche et a d’ores et déjà mené à prendre des initiatives concrètes, en concertation avec l’AUF, pour tenter d’éviter que certaines institutions ne soient les victimes impuissantes et résignées de la fracture numérique.

Outre d’autres missions telles l’évaluation institutionnelle de facultés de Lettres qui en émettent la demande ou encore l’aide à la publication bilingue de chefs d’œuvre de la littérature française, l’AFELSH élabore également des programmes de mobilité à destination des départements de français de l’enseignement supérieur ; un appel aux candidatures est d’ailleurs en préparation.

L’élection du nouveau Comité exécutif à l’automne dernier a été l’occasion pour chacun d’exprimer ses attentes pour les trois années académiques à venir. Le travail de fond qui a commencé depuis promet un renforcement notable des initiatives et ouvre des perspectives d’extension, d’approfondissement et de systématisation des échanges. Que de nouvelles régions du monde, dont des universités d’Amérique du Sud, frappent aux portes de l’AFELSH démontre à suffisance la nécessité qu’il y a aujourd’hui à s’inscrire dans le mouvement.

Prof. Louis Gerrekens  (Vice-doyen de la Faculté de Philosophie et Lettres, Université de Liège.  Membre du Comité exécutif 2007-2010 et trésorier adjoint de l’AFELSH)